Pourquoi le Cameroun investit massivement dans l’énergie de la biomasse
Face à un déficit énergétique chronique et une demande croissante en électricité, le Cameroun mise sur la biomasse pour diversifier son mix énergétique. Avec un potentiel sous-exploité de 1 050 TWh/an et des projets structurants, le pays transforme ses déchets organiques en opportunités économiques et écologiques.
Contexte énergétique et urgence de diversification
Le Cameroun subit un déficit énergétique estimé à plus de 1 000 MW, avec des coupures fréquentes et un taux d’électrification rurale inférieur à 22% dans les régions du Nord. Le mix actuel repose à 73,3 % sur l’hydroélectricité et 25,5 % sur le thermique, ce dernier étant coûteux et polluant. La biomasse, marginale (1 %), devient une solution stratégique pour :
- Réduire la dépendance aux hydrocarbures.
- Électrifier les zones rurales isolées.
- Valoriser les résidus agricoles et forestiers.
Le potentiel inexploité de la biomasse camerounaise
Des ressources abondantes et variées
Le Cameroun dispose de :
- 22 millions d’hectares de forêts (48,3 % du territoire).
- 4,5 millions de tonnes de déchets annuels de bananiers, transformables en bioéthanol ou granulés.
- 37 sites identifiés pour produire 37 MW via la biomasse.
Tableau 1 : Potentiel énergétique comparé
Source | Potentiel annuel | Taux d’exploitation |
Biomasse | 1 050 TWh | < 5 % |
Solaire | 780 TWh/jour | < 5 % |
Hydroélectricité | 294 TWh | ~30 % |
Stratégie gouvernementale et investissements structurants
Incitations légales et partenariats
La loi de 2013 offre des exonérations fiscales sur 5 à 10 ans pour les projets privés dans les énergies renouvelables. Résultats :
- Biomass Cameroon investit 2,9 milliards FCFA (4,4 M€) dans des copeaux de bois énergétiques.
- Compagnie générale des granules consacre 1,1 milliard FCFA (1,7 M€) à une usine de biocombustibles.
- Projet PUERTEM (UNESCO) : promotion de briquettes de biomasse et foyers améliorés dans le Nord.
Tableau 2 : Projets clés en biomasse
Projet | Investissement | Emplois créés | Production |
Biomass Cameroon | 4,4 M€ | 200 | 50 000 t/an |
Compagnie générale des granules | 1,7 M€ | 100 | 20 000 t/an |
Unité de l’Est-Cameroun | NC | 50 | Charbon et pellets |
Impacts socio-économiques et environnementaux
Création d’emplois et développement local
Les projets en cours génèrent 300 emplois directs, principalement en zones rurales. La valorisation des déchets agricoles augmente aussi les revenus des planteurs de bananes ou de canne à sucre.
Réduction de la pression forestière
Le bois-énergie issu de déchets industriels ou agricoles diminue la coupe anarchique d’arbres, surtout dans le Septentrion où 95 % des ménages utilisent le bois de chauffage.
Défis et perspectives futures
Obstacles à surmonter
- Technologie : Nécessité de formations spécialisées.
- Financement : Appel à plus d’investisseurs privés et internationaux.
- Infrastructures : Optimisation des chaînes logistiques pour desservir les zones reculées.
Feuille de route 2025-2030
Le gouvernement vise :
- L’exploitation de 10 % du potentiel biomasse d’ici 2030.
- L’installation de 20 unités locales de transformation de déchets.
- Une collaboration accrue avec l’UE et l’UNESCO pour des projets hybrides (solaire-biomasse).
Conclusion
Le Cameroun transforme sa crise énergétique en opportunité verte. En capitalisant sur ses ressources organiques et en mobilisant acteurs publics et privés, le pays pourrait devenir un modèle africain d’économie circulaire. La biomasse n’est pas qu’une solution technique : c’est un levier d’autonomie et de résilience climatique.